Les Églises de Suisse défendent leur existence médiatique — Communauté d'Églises en mission

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Les Églises de Suisse défendent leur existence médiatique

Les Églises protestantes de Suisse romande, dont plusieurs sont membres de la Cevaa, se mobilisent à l'approche de la votation de l'initiative «No Billag» : elle se traduirait par une suppression de la redevance servant à financer l'audiovisuel public et par la fin de ses missions de développement culturel et d'aide à la libre formation de l'opinion. Les émissions religieuses, qui avaient déjà dû faire face à de sérieuses restrictions budgétaires, seraient tout particulièrement menacées. Les Églises pourraient perdre quasiment toute représentation dans les médias.
Visuel de la campagne "No Billag" © DR

Des Églises peuvent-elles purement et simplement disparaître du paysage médiatique ? C'est ce que redoutent les Églises suisses francophones avec l'initiative «No Billag», qui prévoit la suppression de la redevance servant au financement de l'audiovisuel public. A l'approche de la date prévue de la votation, le 4 mars prochain, les diverses composantes de la société suisse prennent parti, du monde du spectacle jusqu'au monde du sport, pour dénoncer un projet qui risquerait de soumettre le paysage médiatique à l'influence des grands groupes privés. La Fédération des Églises protestantes de Suisse s'est engagée elle aussi contre cette initiative ; et à sa suite, les conseils synodaux des diverses Églises de Suisse romande membres de la Cevaa appellent les uns après les autres à rejeter le projet.

Le débat est typique du système politique suisse, qui permet à tout groupe de plus de 100.000 citoyens ayant le droit de vote, de proposer une modification de la Constitution fédérale. C'est le principe de l'initiative populaire fédérale, qui permet de faire émerger des débats de société sans devoir consulter les autorités fédérales, et qui est devenu aujourd'hui l'un des principaux moyens d'expression des partis ou groupes politiques dans le pays. Si les 100.000 signatures requises sont atteintes dans un délai de 18 mois, l'initiative populaire est soumise à la votation de tous les citoyens suisses. Si elle est approuvée, elle se traduira par une réécriture d'une partie de la Constitution : dans le cas de l'initiative «No Billag», ce serait l'article 93 sur l'audiovisuel qui serait transformé. Cet article, sur lequel s'appuie le texte qui autorise actuellement le prélèvement d'une redevance au bénéfice de la Société suisse de radiodiffusion et télévision (SRG SSR), détaille les missions confiées à la radio et la télévision par la Confédération : formation, développement culturel, libre formation de l’opinion et divertissement. Ces missions doivent tenir compte des particularités du pays – les différentes langues nationales notamment – et refléter équitablement la diversité des opinions. La nouvelle version de cet article voulue par l’initiative supprimerait ces missions, prévoyant en outre que la Confédération ne subventionne plus aucune chaîne de radio ou de télévision, et ne prélève plus aucune redevance. Cette initiative, partie de Suisse alémanique, et titrée «Oui à la suppression des redevances radio et télévision», a rapidement pris le nom d'initiative «No Billag» - Billag étant le nom de l'entreprise, filiale de Swisscom, chargée de collecter et d'affecter les redevances audiovisuelles en Suisse.

«Si l’initiative est acceptée, l’Église perdra une voix qui compte»

Pour aller plus loin :

«Il y a actuellement une très forte mobilisation notamment du côté suisse francophone», témoigne Nicolas Monnier, Directeur de DM-échange et mission, le Département missionnaire des Églises protestantes de Suisse romande. «Elle est très marquée dans les milieux culturels, et également dans les milieux d'Églises, qui bénéficient actuellement d'un programme garantissant leur présence médiatique dans les programmes de l'audiovisuel public. Or ce programme est déjà soumis à de fortes pressions budgétaires : il y a un peu plus de deux ans, un comité de soutien composé de politiques, de sociologues et d’écrivains avait dû lancer une pétition pour défendre les magazines religieux diffusés sur les chaînes radio et TV du service public. Il y avait eu un vif débat dans notre pays. Si l'initiative «No Billag» devait passer, les moyens dont dispose actuellement la Radio Télévision Suisse seraient terriblement réduits, et les programmes existants dont bénéficient les Églises d'autant plus menacés... »

Les tenants du «oui» estiment que le prix des redevances que paient non seulement les particuliers, mais aussi les entreprises est un frein pour l'économie. Ils affirment qu'avec la suppression de la redevance, c'est 1,3 milliards de francs suisses qui seraient mécaniquement réinjectés dans l'économie réelle. Ils pointent par ailleurs la nécessité d'économies au sein de la SSR. Les opposants à cette initiative craignent pour leur part que le seul critère de choix des programmes devienne la rentabilité. La Fédération des Églises protestantes de Suisse, dont la prise de position est de plus en plus relayée par les Églises suisses membres de la Cevaa, affirme pour sa part : «Une Suisse démocratique a besoin de médias de service public, qui assurent une couverture médiatique plurielle et donnent une voix aux minorités ainsi qu'aux plus faibles.» Ce que résume son président, Gottfried Locher : «Les émissions religieuses de la radio et de la télévision véhiculent des valeurs chrétiennes. Si l’initiative «No Billag» est acceptée, l’Église perdra une voix qui compte.»

Franck Lefebvre-Billiez

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